Le géoblocage de médias numériques appartiendra bientôt au passé

Analyse Les abonnés de Netflix ont sans doute déjà eu l'expérience de ne plus pouvoir regarder leurs séries ou films lors d'un séjour dans un autre État membre de l'UE du fait que ceux-ci n'y sont pas disponibles. Cela ne sera plus le cas à l'avenir.

La Commission européenne a présenté en mai 2015 sa stratégie pour le marché unique numérique  qui vise à éliminer les obstacles qui existent encore en ligne et à promouvoir les activités en ligne transfrontalières. 


L'une des propositions vise à étendre la portabilité des services de médias en ligne et de faire en sorte que le contenu numérique ne soit pas seulement disponible dans le pays où il a été acheté.

Cela est en effet beaucoup trop limité par le fonctionnement des droits d'auteur qui, malgré une certaine harmonisation au niveau européen, ont encore un caractère national considérable. La stratégie pour le marché unique numérique met également la priorité sur la modernisation de la législation européenne sur les droits d'auteur et son adaptation au fonctionnement actuel du marché en ligne.

La proposition d'un règlement européen afin de rendre le contenu en ligne plus accessible, et afin de supprimer l'obstruction par le géoblocage, est une étape importante dans ce cadre. La proposition de règlement date du mois de décembre 2015, mais le règlement n'a été adopté formellement par le Conseil que le 8 juin 2017. 

1.  Le géo-blocage

Le soi-disant géoblocage a comme conséquence que les fournisseurs de services de médias en ligne peuvent limiter l'accès du consommateur et rendre le contenu dépendant de l'endroit où le consommateur se trouve.

Le géoblocage n'est pas seulement un obstacle dans ce secteur. Certains commerçants restreignent l'accès à leur boutique en ligne à certains États membres ou font en sorte que les conditions dépendent du pays où réside le consommateur. La Commission européenne souhaite également mettre fin à cette situation, et a déjà fait une proposition visant à supprimer cet obstacle.

La collecte et la distribution des droits d'auteur sont à l'origine de cette restriction de la portabilité transfrontalière

La collecte et la distribution des droits d'auteur sont à l'origine de cette restriction de la portabilité transfrontalière. Les droits d'auteur concernant le contenu numérique sont soumis à des accords de licence entre les distributeurs de films, de séries et de livres et des fournisseurs de services de médias en ligne. Étant donné que ces accords de licence incluent souvent des restrictions géographiques (pour des raisons d'exclusivité), les fournisseurs sont tenus d'interdire l'accès à leurs services à partir des adresses IP en dehors de la zone géographique convenue.

Cela appartiendra bientôt au passé. La Commission européenne considère que le géo-blocage est une entrave non justifiée au marché unique. La proposition de règlement y mettra un terme.

2. Les services qui tombent sous le champ d'application du règlement

Le règlement porte uniquement sur les services de contenu en ligne qui sont offerts contre paiement, comme Netflix ou Spotify, et les services de contenu en ligne fournis gratuitement, à condition que les opérateurs contrôlent l'État membre d'origine de leurs abonnés.

Les services de contenu en ligne qui offrent leur contenu gratuitement, et ne contrôlent pas leurs utilisateurs ne relèvent pas du champ d'application.

Le paiement de ces services peut être tant direct qu'indirect. La Commission donne comme exemple de paiement indirect, la situation dans laquelle un abonné paie pour un ensemble de services qui combine un service de télécommunications avec un service de contenu en ligne d'un autre fournisseur.

En revanche, lorsqu'un fournisseur met un contenu en ligne à disposition, sans que l'utilisateur ait à s'enregistrer, le contenu ne doit pas être accessible dans d'autres pays membres.

Les restrictions géographiques dans les contrats de licence ne seront pas opposables aux fournisseurs

La proposition de règlement prévoit que les fournisseurs de services de médias en ligne ne peuvent pas être tenus responsables des violations éventuelles de leurs contrats de licence, qui sont contraires à l'obligation de fournir l'accès au contenu dans un autre État membre. En d'autres termes, les restrictions géographiques dans les contrats de licence ne seront pas opposables aux fournisseurs.

La livraison de contenu en ligne aux abonnés qui séjournent temporairement dans un État membre autre que leur État membre d'origine, est considérée avoir eu lieu dans l'État membre de résidence de l'abonné en question.

3.    La protection de la vie privée

Dans la motivation de sa proposition, la Commission a fait une considération particulière sur la protection de la vie privée.

Les détenteurs des droits d'auteur sur le contenu, mis sur le marché par les fournisseurs, ont le droit d'exiger que le fournisseur prenne les mesures efficaces pour vérifier si le service de médias en ligne est fourni conformément à la réglementation. Les mesures à prendre ici par les fournisseurs ne peuvent pas affecter la vie privée des abonnés.

La Commission remarque à cet égard que l'intention n'est pas que les utilisateurs soient sous un contrôle permanent, mais que ce contrôle des adresses IP puisse être effectué au moyen d'échantillage. Ici, la Commission fait valoir que les détails précis de l'abonné ne peuvent pas être collectées et traitées à cet effet puisque l'emplacement n'est pas vraiment important pour ce contrôle, mais plutôt l'État membre où l'abonné reçoit l'accès au service au service. De plus, lorsque l'authentification de l'abonné est suffisante pour accéder au contenu numérique, l'identification de l'abonné ne peut pas non plus être exigée. 

4.    Encore un peu de patience ...

Le règlement entrera en vigueur neuf mois après la publication au Journal officiel de l'UE. On suppose que les nouvelles règles seront appliquées à partir du premier ou du deuxième trimestre de 2018.