La nouvelle réglementation sur l'exercice de certains droits des actionnaires des sociétés cotées

Analyse Le 1er janvier 2012, les actionnaires de sociétés cotées obtiendront, suite à la transposition d'une directive en droit belge, plus de droits en vertu de la loi du 20 décembre 2010. Simultanément, de nouvelles règles pour les actionnaires des sociétés non cotées entreront en vigueur.

La directive contient un certain nombre de mesures visant à renforcer les droits des actionnaires des sociétés cotées et de supprimer les obstacles existants dans la mesure du possible dans le cadre des droits de vote transfrontaliers dans l'Espace économique européen.

Avant d'examiner de façon plus approfondie les mesures prévues, certaines observations doivent être faites au sujet du champ d'application de la Loi.

1. Le champ d'application de la Loi

Le législateur a donné à cette nouvelle loi un champ d’application plus large que celui visé par la directive, en appliquant un certain nombre de mesures de la directive pour les sociétés cotées également à certaines sociétés non cotées.

Principalement pour les sociétés non cotées une partie importante des mesures, introduites par la loi,  sera optionnelle. Ces entreprises auront de ce fait la possibilité juridique d'incorporer un certain nombre de mesures dans leurs statuts, y compris la possibilité de participer de façon électronique à l'assemblée générale, la possibilité de voter à distance sur les points à l'ordre du jour et les modalités d'octroyer une procuration pour assister à une assemblée générale.

La possibilité de participer de façon électronique à l'assemblée générale ou de voter à distance

2. Les nouvelles mesures

Les mesures en vigueur à partir du 1er janvier 2012 peuvent être divisées en mesures relatives à la préparation de l'assemblée générale et celles relatives à la participation à l'assemblée générale.

2.1 Mesures dans le cadre des préparations de l'assemblée Générale

Le délai de convocation de l’assemblée générale des sociétés cotées sera d’au moins 30 jours à partir du 1er Janvier 2012. Lorsque la première assemblée générale n’est pas en mesure de délibérer valablement, étant donné que le quorum n'est pas atteint et à condition que la date de cette deuxième réunion ait été indiquée dans la première convocation, la date limite pour la deuxième assemblée générale sera d’au moins 17 jours.

Les modalités de convocation ont été modifiées également. Le système actuellement en vigueur de l'avis dans le Moniteur belge et dans un organe de presse de diffusion nationale est complété.
Les sociétés cotées devront assurer la publication de la convocation dans des médias dont on peut raisonnablement attendre une diffusion efficace des informations auprès du public dans l’ensemble de l’Espace économique européen et qui sont accessibles rapidement et de manière non discriminatoire (nouvel art. 533 du C. Soc.)

En outre, la Loi élargit le contenu obligatoire de la convocation afin d’attirer explicitement l’attention des actionnaires des sociétés cotées sur leurs (nouveaux) droits.
Toutes ces informations devront rester à la disposition des actionnaires jusqu’au jour de l'assemblée générale sur un site internet que la société est tenue de développer. En outre, les informations stockées dans le site internet doivent rester accessible pendant une période de cinq ans à compter de la date de l'assemblée générale.

Les actionnaires des entreprises auront la possibilité de participer à distance, par des moyens électroniques, à l’assemblée générale

Un ou plusieurs actionnaires possédant ensemble au moins 3% du capital social d'une société cotée pourront, à partir du 1er janvier 2012, requérir l’inscription des sujets à traiter à l'ordre du jour de toute assemblée générale et de déposer des propositions de décision (nouvel art. 533ter C. Soc.). Le seuil existant de 20% pour convoquer une assemblée générale est maintenu.

L'une des principales nouveautés de la Loi - désormais facultative – concerne le système de la date d’enregistrement de l’actionnariat pour la participation à l’assemblée générale qui deviendra obligatoire pour les sociétés cotées. L’admission à l'assemblée générale et les droits de vote dépendront dans l'avenir de l'enregistrement comptable des actions au nom de l'actionnaire, le 14e jour avant l'assemblée générale, à 24 heures (la « date d’enregistrement»),

  • Soit par l'inscription au nom de l'actionnaire dans le registre des actionnaires ;
  • Soit par inscription sur le compte d'un teneur de compte agréé ou d’un organisme de liquidation ; institution de dépôt ; ou
  • Soit par le dépôt des actions auprès d’un porteur à un intermédiaire financier, quel que soit le nombre d'actions que l'actionnaire détient.

Ainsi, l'actionnaire enregistré pourra participer à l’assemblée générale et participer au vote, peu importe celui qui détient les actions après cette date. Il a l’obligation d'informer la société ou la personne qu’il a désignée dans ce cadre au moins 6 jours avant l'assemblée générale à laquelle il souhaite participer.

2.2 Mesures concernant la participation à l'assemblée générale

Quant à la participation à l'assemblée par procuration, la Loi a élaboré un système détaillé, qui s'applique à toutes les sociétés anonymes, cotées ou non. La loi définit ce qu'elle entend par «procuration», à savoir le pouvoir donné par un actionnaire à une personne physique ou morale pour exercer au nom de cet actionnaire tout ou partie de ses droits lors de l'assemblée générale. (nouvel article 547 C. Soc.).

Plus précisément pour les sociétés cotées un 547bis article nouvel C. Soc. impose des règles supplémentaires : par exemple, l'actionnaire d'une société cotée en bourse ne pourra désigner qu’une seule personne comme mandataire pour participer à une assemblée générale. L'actionnaire doit faire cette désignation par écrit ou par voie électronique avec signature électronique.

Les sociétés cotées ou non (sociétés anonymes et SPRL) pourront offrir la possibilité à leurs actionnaires de porter leur vote par procuration avant l'assemblée générale. Cela peut se faire soit par correspondance ou par voie électronique. Il s’agit d’une option facultative, tant pour les sociétés cotées que pour les non cotées, dont les actionnaire peuvent se servir à condition que les statuts de la société introduisent explicitement ce droit.

En outre, la Loi crée la possibilité pour les actionnaires des entreprises cotées (ou non cotées) de participer à distance, par des moyens électroniques, à l’assemblée générale. Ce droit ne s'applique que si les statuts le prévoient expressément. Cette possibilité est dorénavant également introduite pour la SPRL et la SCRL.

Les actionnaires qui participent ainsi à la réunion sont réputés présents à l'endroit où se tient la réunion. Cela ne s’applique pas uniquement pour le respect des conditions de participation, mais également des conditions de majorité. Pour cette application, la société doit être en mesure de contrôler, grâce au moyen de communication électronique la qualité et l'identité de l'associé. Les modalités suivant lesquelles la qualité d'associé et l'identité de la personne désireuse de participer à l'assemblée sont contrôlées et garanties, sont définies par les statuts ou en vertu de ceux-ci.
L'entreprise aura donc un large pouvoir d'appréciation dans l'interprétation légale de ce mode de participation à la réunion afin qu'elle puisse choisir des solutions qui correspondent le mieux à sa  situation et de prendre en compte les évolutions technologiques pertinentes. La possibilité de tenir une assemblée générale avec des actionnaires avec une présence «électronique» ne signifie pas que l'exigence de tenir une assemblée générale physiquement disparaît. Le Bureau, le conseil d'administration et le commissaire sont tenus d'être présents physiquement.

La loi modifie et clarifie les limites dans lesquelles les actionnaires peuvent utiliser leur droit de poser des questions, qui pourra être exercé à la fois par voie orale (au cours de l'assemblée générale) et par écrit (avant l'assemblée générale par des moyens de communication électroniques) (nouvel article 540 C. Soc.).

Ces précisions s'appliquent aux sociétés cotées et non cotées publics, comme la SPRL, la SCRL, la SE (Societas Europaeae ») et la SEC (Societas Cooperativae Europaeae).

La loi réaffirme le principe selon lequel les administrateurs (et les commissaires) sont tenus de répondre aux questions posées par les actionnaires pour autant que la réponse n’est pas de nature à porter préjudice aux intérêts commerciaux de la société ou aux engagements de confidentialité souscrits par la société, ses administrateurs et commissaires. Auparavant, le critère était que la réponse ne pouvait pas causer de graves préjudices à la société, ses actionnaires ou son personnel.

Uniquement pour les sociétés cotées, la loi prolonge le délai du droit de reporter l’assemblée générale par le conseil d'administration en raison d'une notification d'une grande participation de 3 à 5 semaines.
Le délai endéans lequel le conseil d’administration peut proroger la décision relative à l’approbation des comptes annuels par l'assemblée générale sera fixé pour les sociétés cotées à 5 semaines (nouvel article 555 C. Soc.).
Il est à noter que les changements ci-dessus ne s'appliquent que dans la SA et la SE.

Enfin, à partir du 1er janvier 2012, les procès-verbaux des assemblées générales des sociétés cotées, devront mentionner, pour chaque décision, le nombre d'actions pour lesquelles des votes ont été valablement exprimés, la proportion du capital représentée par ces votes, le nombre total de votes valablement exprimé, le nombre de votes exprimé pour ou contre chaque décision et le nombre d'abstentions. Ces informations doivent être rendues publiques par ces sociétés sur leur site internet dans les 15 jours qui suivent l'assemblée générale.

3. Entrée en vigueur

Les dispositions nouvelles et révisées entreront en vigueur le 1 janvier 2012.

Les entreprises sont tenues d’adapter leurs statuts en conformité avec la Loi pour cette date. Si les statuts ne sont pas actualisés en temps voulu, les clauses qui ne correspondront pas avec les dispositions de la nouvelle loi seront considérées comme non écrites et les dispositions impératives de la présente loi s'appliqueront à ces sociétés à partir du 1er janvier.

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Alain De Jonge

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Partner
Leo Peeters

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