- Droit Social
- réseaux sociaux , employeur , employé , droit à la vie privée , liberté d'expression , licenciement pour motif grave
Un employeur peut-il prendre des mesures à l’encontre de l’un de ses employés si l'un de ceux-ci publie sur les réseaux sociaux un message qui lui est préjudiciable ou qui nuit à son entreprise ?
Ces dernières années, les réseaux sociaux sont devenus un outil pratique et puissant que « we all like ». Son utilisation dans le contexte professionnel était également inimaginable il y a quelques années.
De nombreuses entreprises accueillent et encouragent même l'utilisation des réseaux sociaux par leurs employés pour promouvoir les activités, les produits et les services de leur entreprise.
De nombreux employés ont un profil personnel sur les réseaux sociaux, où ils peuvent se profiler comme employés d'une certaine entreprise.
Si l'employeur peut, dans une certaine mesure, contrôler l'utilisation des réseaux sociaux par ses employés lorsque celle-ci est directement liée à l'entreprise, tant la question que la réponse sont plus sensibles lorsqu’il s’agit de plateformes externes au contexte professionnel.
Plus spécialement, la question est de savoir si un employeur est autorisé à prendre des mesures lorsqu'un employé exprime sur les réseaux sociaux des opinions négatives sur l'entreprise et ses produits et services, ou y affiche un point de vue qui est fondamentalement en contradiction avec la philosophie et les activités de l'employeur, parce qu’il n'est en effet pas exclu qu'un tel « post » ait un impact négatif sur l'entreprise.
A titre d'exemple : Pierre travaille pour une entreprise pharmaceutique qui vient de lancer un nouveau médicament sur le marché. Il exprime explicitement son mécontentement à ce sujet, non seulement à ses collègues et amis, mais aussi sur une page Facebook publique, où il est apparent qu'il est un employé de cette société pharmaceutique. Un client régulier de l'entreprise, qui vient de commander un stock important du médicament, en prend conscience et demande des explications à la société pharmaceutique. Pierre est ensuite appelé à rendre des comptes à son employeur. Ses déclarations sur Facebook pourraient avoir de lourdes conséquences.
L'employeur ne va sans doute pas « liker » ce type de contenu, mais peut-il en fait réagir contre ce genre de choses ?
Il n'existe pas de législation spécifique régissant l'utilisation des réseaux sociaux sur le lieu de travail et au-delà.
Mais les employés invoquent souvent leur droit à la vie privée et à la liberté d'expression.
L'employeur doit donc s'assurer qu'il peut concilier son autorité d'employeur avec les différents instruments juridiques existants dont il dispose (CEDH, CCT n° 81, RGPD, etc.).
En effet, il est possible qu'un « post » contenant une remarque sur l'entreprise de l'employé ou sur son produit ou service devienne accessible au public et soit disponible pour tous les autres internautes (par exemple, des commentaires sur des pages publiques sur Facebook, LinkedIn, Instagram, etc.)
Jusqu’où le droit à la vie privée et à la liberté d'expression de l'employé s’étendent-il ?
Les employés doivent être bien conscients du fait que leurs déclarations ou leur comportement sur les réseaux sociaux, les blogs, les forums et autres sites web basés sur du « user generated content » sont également visibles par d'autres utilisateurs d'Internet, y compris l'employeur et ses clients, ses fournisseurs et autres partenaires.
En ce sens, le droit à la vie privée n'est pas absolu.
La Cour Européenne des Droits de l'Homme a déjà confirmé à plusieurs reprises que le droit à la vie privée peut être tempéré lorsqu’un individu met sa vie privée en contact avec le domaine public.
Le droit à la vie privée doit donc être envisagé dans le contexte spécifique des attentes raisonnables en matière de vie privée de l'employé en question. La question est de savoir si, dans les circonstances données, l'employé pouvait raisonnablement s'attendre à une intrusion dans sa vie privée. Plus un salarié donne de publicité à ses propos sur internet et les réseaux sociaux, plus il peut s'attendre à ce que des tiers en prennent note et moins il pourra invoquer le droit à sa vie privée.
Dans le cas des posts de réseaux sociaux, vu que l’employeur peut également trouver ou consulter ces informations, il n'est plus si évident pour l'employé d’invoquer son droit à la vie privée.
Il est donc extrêmement important de prendre ça en considération...
Le droit à la liberté d’expression n'est pas non plus absolu.
Il est généralement admis que la critique, par exemple d'un employeur, est protégée tant qu'elle n'est pas faite de manière insultante ou diffamatoire, ou tant que l'employé ne la rend pas publique, afin de ne pas porter préjudice à l'employeur ou à sa réputation.
L’employé qui critique son employeur ou ses politiques, produits et services sur des réseaux sociaux accessibles au public risque ainsi un licenciement pour motif grave (cf. l'exemple cité de Pierre). Cela a déjà été confirmé à plusieurs reprises par les tribunaux du travail.
En vertu du principe de bonne foi, la loi du 3 juillet 1978 sur les contrats de travail prévoit une obligation de respect mutuel entre l'employé et l'employeur et un devoir de loyauté de l’employé envers son employeur.
Il s'ensuit que l'employé doit s'abstenir de tout acte qui pourrait être préjudiciable ou déloyal envers l'employeur et son entreprise, en ce compris les déclarations négatives sur les réseaux sociaux.
Ainsi, tout en respectant les droits fondamentaux de l'employé, l'employeur peut s'appuyer sur les mécanismes prévus par la loi sur les contrats de travail et d'autres instruments juridiques du droit social (notamment la CCT n°81), afin de modérer, voire sanctionner, le comportement de l'employé sur les réseaux sociaux.
Une relation de travail a un impact important sur les droits fondamentaux de l’employé, tels que sa vie privée et sa liberté d'expression, car cette relation implique que l'employeur exerce une certaine autorité sur l’employé.
D'après ce que nous avons vu ci-dessus, le droit à la vie privée et à la liberté d'expression ne sont pas absolus et les employés doivent en tenir compte dans leurs attentes en matière de protection de ces droits.
Il est donc extrêmement important, en tant qu'employeur, de conclure des accords clairs à ce sujet en mettant en œuvre une politique raisonnable en matière de réseaux sociaux. Cela peut être assuré par l'introduction d'une politique d’entreprise équilibrée en matière de réseaux sociaux.
Vous souhaitez savoir quelle est la meilleure approche pour votre entreprise ? Nous sommes heureux de vous aider à développer une politique des réseaux sociaux. N'hésitez pas à nous contacter à l'adresse suivante : info@seeds.law.