Le règlement Bruxelles I bis

Nouvelles règles de compétence

Analyse Le règlement Bruxelles I bis, qui sera mis en vigueur le 10 janvier 2015, introduit une simplification importante en ce qui concerne les procédures qui se produisent avec des adversaires établis dans un autre État membre de l'UE.

Le nouveau règlement Bruxelles I bis (règlement (UE) no. 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 Décembre 2012 concernant la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale), qui entre en vigueur le 10 Janvier 2015, modifie les règles de compétence judiciaire au niveau européen.

Ce règlement détermine la compétence judiciaire dans le cadre de litiges transfrontaliers entre les Etats membres de l'UE et développe les conditions sur base desquelles un jugement sera reconnu et pourra être exécuté dans un autre État membre. 

L'objectif du nouveau règlement est de faciliter la libre circulation des décisions judiciaires en matières civile et commerciale et d'améliorer l'accès à la justice.

L'objectif du nouveau règlement est de faciliter la libre circulation des décisions judiciaires en matières civile et commerciale et d'améliorer l'accès à la justice

L'ancien règlement Bruxelles I, et successeur du règlement EEX,  a été introduit en 2002 et 10 ans plus tard il était temps pour une évaluation. Avec cette adaptation, le Parlement européen vise à satisfaire sur certains points sensibles de l'ancienne version.

Il avait été constaté que la procédure d'exequatur était longue et coûteuse, et l'exclusion de l'arbitrage du champ d'application de la réglementation était  considérée insuffisant.

Les principaux changements concernant le champ d’application, la modification de la règle de litispendance et la suppression de l'exequatur.

1. Modification du champ d’application

Le champ d'application du règlement a été légèrement modifié. Il s’applique encore en matière civile et commerciale, et reprend l'exclusion des affaires fiscaux, des douanes et administratives. Toutefois, l'exclusion pour les réclamations relatives à la responsabilité de l'Etat pour des actes ou omissions dans l'exercice de la puissance publique et aux obligations alimentares est nouvelle.

En ce qui concerne l'arbitrage, l'évaluation de la validité d'une clause d'arbitrage est laissée entièrement à la législation nationale. Etant donné que l'arbitrage ne tombe pas sous l'application du règlement, une décision d'arbitrage n’est pas soumis au régime de la reconnaissance et l’exécution. Cette dernière est toujours règlementée par la Convention de New York de 1958.

2. Introduction d'une exception à la règle de litispendance

Sous l'ancien règlement, il était prévu que lorsque les tribunaux sont saisis dans plusieurs États membres pour les créances ayant le même objet, la derniére juridiction requise deva être tenue de surseoir à statuer jusqu’au moment où la première juridiction avait déclaré d’être oui ou non compétente (règle de litispendance).

Cependant, dans la pratique ce principe était souvent utilisé dans le seul but de retarder l’affaire.

Pour remédier à cet abus,  le nouveau règlement a introduit une exception dans ce cadre. Lorsqu’une affaire est portée devant la juridiction d'un Etat membre à compétence exclusive en vertu d'une clause de for,  toute juridiction des autres Etats membres doivent surseoir à statuer jusqu'à ce que la juridiction saisie en vertu de l'accord sur la compétence déclare ne pas être compétent en vertu de l’accord. Ce n’est que lorsque ce tribunal décline sa juridiction que les tribunaux des autres Etats membres où l'affaire a été introduite peuvent se prononcer leur compétence.

Bien que la règle de litispendance, en soi, est préservée, cette exception est une amélioration majeure.

Il convient de noter que cette règle ne joue pas quand un employé, assuré ou consommateur agit en tant que demandeur, ou s’il existe un conflit de clauses de compétence.

3. Modifications au sujet de l’élection de for

Aussi en ce qui concerne les clauses relatives à la compétence (juridiction), il ya eu quelques changements.

L'article 25 du règlement Bruxelles I prévoit expressément qu'une clause désignant un tribunal compétent qui fait partie d’une convention est considérée comme une clause distincte des autres dispositions de la convention. Cela implique que la validité d'une clause attributive de juridiction ne peut être niée uniquement sur la base du fait que le contrat n’est pas valide.

Le tribunal devra examiner et évaluer  la validité d'une clause attributive de compétence.

Il est à noter qu’il est conseillé, afin d’éviter toute discussion, de prévoir une clause de for dans des relations contractuelles.

4. Procédure de reconnaissance et l'exécution des jugements

La procédure de reconnaissance et l'exécution des jugements a complètement été modifiée.

Pour exécuter un jugement dans un autre Etat membre, il ne faut plus de déclaration constatant la force exécutoire. Le processus de mise en œuvre en soi est régi par le droit de l'Etat membre où il est exécuté.

Le requérant, qui ne doit plus faire appel à la procédure d'exécution, peut donc donner immédiatement instruction à un huissier de justice de procéder à l’exécution. Le requérant a toutefois encore besoin d'un certificat délivré par le tribunal d'origine, attestant que la décision est exécutoire dans le pays d'origine.

Il est toujours possible de refuser la reconnaissance ou l'exécution, fondée sur les motifs de refus spécifiés en tant que contraire à l'ordre public ou incompatible avec des décisions antérieures.

Le débiteur (ou toute autre partie prenante) sera tenu de prendre l'initiative. Auparavant, le débiteur avait un recours supplémentaire pour s’opposer à l'octroi de l'exequatur. Tenant compte du fait que la procédure d'exequatur a été supprimée, ce remède est évidemment également supprimé.

5. Les mesures provisoires

Le règlement Bruxelles I bis a également prévu une innovation en termes de mesures provisoires.

Ceux-ci tombent désormais de façon explicite sous le système de reconnaissance et d'exécution explicite, avec la nuance que si elles ont été octroyées de manière unilatérale, la décision doit être notifiée avant que sa mise en exécution ne soit possible.

En outre, le règlement précise que si les mesures imposées par une juridiction d'un Etat membre qui n'a pas compétence pour prendre connaissance de l'affaire, les effets de ces mesures seront limitées au territoire de cet Etat membre.

6. Conclusion

Le nouveau système permettra de simplifier la reconnaissance et l'exécution des décisions dans d'autres Etats membres. Cela réduit non seulement les coûts, mais aussi le risque que la mise en exécution des décisions judiciaires puisse être retardée sans raison.

En d'autres termes, le présent règlement est conçu pour organiser efficacement les procédures transfrontalières, ce qui est évidemment favorable à l'unification du marché intérieur.

 

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Alain De Jonge

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