Analyse
Récemment deux directives européennes ont été transposé par une loi concernant la protection des consommateurs dans le cadre de contrats de fourniture de contenu numérique et de services numériques et de contrats de vente de biens.
Cette loi très importante s’inscrit dans la volonté du législateur de protéger davantage les consommateurs lors de la conclusion de contrat de consommation de manière générale.
D’une part, cette nouvelle loi élargit les règles existantes pour tout les contrats, et d’autre part, elle introduit des règles spécifiques en matière numérique. Elle rend notamment les opérations transfrontalières d'achat et de vente de biens et de contenu numérique plus faciles et plus sûres pour les consommateurs et les entreprises.
1. Quels sont les biens nouvellement visés ?
La loi rajoute le champ d’application de la garantie légale les contenus numériques.
Il s’agit de tout objet mobilier corporel qui intègre un contenu numérique, ou un service numérique, ou est interconnecté avec un tel contenu ou un tel service d’une manière telle que l’absence de ce contenu numérique ou de ce service numérique empêcherait ce bien de consommation de remplir ses fonctions.
À titre d’exemple, sont considérés comme un « contenu numérique » ou « service numérique » : les films, les applications, la musique, les jeux vidéos et logiciels, les réseaux sociaux ainsi que les téléchargements.
Suite au développement d’internet et, de manière plus générale, des technologies de l’information et de la communication, les transactions portant sur des objets de contenu numérique ont provoqué une explosion des transactions. De telles transactions pourront être concrétisées par la délivrance d’un support physique intégrant le contenu numérique en question – par exemple un CD ou un DVD – mais également au moyen d’un téléchargement en ligne – le téléchargement d’une application sur Google Play, d’une mise à disposition en streaming – via une plateforme telle que Netflix ou Spotify.
La plupart des services accessibles en ligne sont donc en réalité visés par la nouvelle loi.
De plus, la loi précise que l'électricité (en plus du gaz et de l'eau) est considérée comme un bien meuble corporel lorsqu'elle est mise en vente dans un volume limité ou une quantité déterminée.
Par contre, les contrats de vente d'animaux vivants sont exclus du champ d'application de la loi.
2. Quelles sont les nouveautés en matière de conformité ?
La définition du défaut de conformité est légèrement modifiée. Désormais, le vendeur doit livrer le bien au consommateur « avec tous les accessoires et instructions, y compris d'installation » et avec les mises à jour prévues au contrat pour que la vente soit considérée conforme.
Pour les biens comportant des éléments numériques, le vendeur doit également fournir les mises à jour de sécurité nécessaires au maintien de la conformité du bien pendant la période à laquelle le consommateur peut raisonnablement s'attendre.
Mais le consommateur a également des obligations. Si le consommateur n'installe pas, dans un délai raisonnable, les mises à jour fournies par le professionnel, ce dernier ne sera pas responsable du défaut de conformité. De même, un défaut de conformité résultant d'une mauvaise intégration du contenu numérique ou du service numérique dans l'environnement numérique du consommateur ne sera pas considéré comme un défaut de conformité du professionnel si cette mauvaise intégration est due au consommateur.
La durabilité devient également un critère d'évaluation de la conformité des biens. Les biens doivent être capables de conserver leurs fonctions et leurs performances dans des conditions normales d'utilisation. La durabilité est évaluée en fonction de la nature du bien et en tenant compte des déclarations publiques faites par le vendeur ou d'autres personnes en amont dans la chaîne de contrats (par exemple, le producteur).
3. Quels sont les impacts de cette nouvelle loi sur les délais de garantie légale ?
Un changement très important au bénéfice du consommateur est l’extension de la période pendant laquelle le bien a été présumé livré défectueux.
Auparavant, il fallait que le défaut apparaisse dans les 6 premiers mois après l’achat.
Désormais, cette présomption est étendue pendant l’ensemble des deux ans de la garantie légale.
Le consommateur n’aura donc plus à prouver que le défaut existait dès l’origine pour pouvoir faire jouer la garantie.
Cette extension de deux ans augmentera considérablement la responsabilité des revendeurs car tous les biens vendus aux consommateurs, qui présentent un défaut de conformité dans les deux ans, devront être réparés ou remplacés aux frais du vendeur. La Belgique offre donc une large protection alors que cette période peut être d'un an seulement dans les autres Etats membres.
Par contre, en ce qui concerne le contenu numérique et les services numériques, la présomption de responsabilité du vendeur reste toutefois limitée à un an, et non deux.
4. Quelles sont les exigences en matière de garantie commerciale ?
En plus de la garantie légale, il arrive que le vendeur ou le fabricant du produit octroie une garantie supplémentaire, appelée « garantie commerciale ». Celle-ci ne peut évidemment jamais réduire la garantie légale.
Cette garantie est désormais réglementée par la nouvelle législation.
Dans le but d’éviter que le consommateur ne soit induit en erreur, le texte prévoit que, lorsque les conditions de garantie commerciale figurant dans la publicité correspondante sont plus favorables au consommateur que celles incluses dans la déclaration de garantie, les conditions les plus avantageuses prévalent toujours au bénéfice du consommateur.
5. Les voies de recours des consommateurs en cas de défaut de conformité
Le nouveau régime ne diffère pas fondamentalement du régime actuel, excepté qu’il assouplit la hiérarchie des recours à disposition du consommateur (réparation, échange, réduction du prix, résolution du contrat).
Dorénavant, le consommateur a le droit d’exiger du vendeur une réduction proportionnelle du prix ou la résolution du contrat de vente dans chacun des cas suivants :
- Le vendeur n’a pas effectué la réparation ou le remplacement ou, le cas échéant, le vendeur a refusé de mettre les biens en conformité ;
- Un défaut de conformité apparaît malgré la tentative du vendeur de mettre les biens en conformité ;
- Le défaut de conformité est si grave qu’il justifie une réduction immédiate du prix ou la résolution immédiate du contrat de vente ;
- Le vendeur a déclaré, ou il résulte clairement des circonstances, que le vendeur ne procédera pas à la réparation ou au remplacement des biens en vue de leur mise en conformité dans un délai raisonnable ou sans inconvénient majeur pour le consommateur.
En effet, lorsqu’un défaut de conformité apparaît, le consommateur doit en informer le vendeur afin de lui donner la possibilité de mettre le bien en conformité. Le consommateur ne devrait pas, en principe, avoir droit immédiatement à une réduction du prix ou à la résolution du contrat. En plus de ces recours, la loi prévoit certains recours supplémentaires, comme l'octroi de dommages et intérêts.
6. Que se passe-t-il en cas de non-respect des dispositions de la nouvelle loi ?
Le non-respect des exigences de la loi peut faire l'objet d'enquêtes et de sanctions prévues par le Code de droit économique. En conséquence, l'Inspection économique belge pourrait imposer des amendes administratives en cas d'infraction. Ces infractions peuvent également être sanctionnées pénalement. Il convient aussi de noter qu'au-delà d'une procédure classique de cessation et d'abstention, ces infractions peuvent donner lieu à une action en réparation collective.
7. Quand la nouvelle loi est-elle entrée en vigueur ?
La nouvelle loi s'applique à partir du 1er juin 2022. Les dispositions s'appliquent aux contrats conclus après le 1er juin 2022.
Il est donc important pour tous les commerçants et vendeurs de se familiariser avec les nouvelles règles et d’adapter leurs contrats de consommation de manière générale et leurs contrats de fourniture de contenus numériques et services numériques en conséquence, notamment dans les conditions générales.
Si vous souhaitez obtenir de plus amples informations sur la protection des consommateurs ou si vous souhaitez être assisté, n'hésitez pas à contacter nos spécialistes via info@seeds.law ou +32 (0)2 747 40 07.